Quand l'aube se lève
..:Prologue:..
Les âmes naissantes déambulaient dans un enchevêtrement de couloirs industriels. Les couleurs du jour avaient laissées place à celle des ténèbres qui se répandaient sur un monde triste, envieux, colérique mais ivre des passions des êtres qui le peuplent. Un monde où l'obscure rebute et pourtant, il fascine. Un monde où l'étrange et la curiosité ont pris le pas sur la réserve et la sobriété. Desromais, les êtres s'affirment, se manifestent et finissent par mourir. Seuls. Car ce monde renferme le plus terrible des démons: la solitude. Un monstre gorgé de pouvoirs, laissant abattra sa colère sur les Innocents. Un monstre insatiable et dont la cupidité des êtres le faisait rire: ils l'ignorent toujours un peu plus, renforçant ainsi son pouvoir ténébreux.
Ainsi va le monde, on naît, on valse, on meurt et on recommence. Les gens ne prennent plus le temps de faire, de créer. Ils se contentent des vestiges d'un passé trop lourd à porter pour finalement les détruire, preuve, pensent-ils d'une évolution. Ces êtres là n'évoluent pas. Ils dégénèrent plus qu'autre chose. Ils se souviennent du temps où ils étaient encore des hommes libres. Ils se souviennent avant de se renfermer dans un rituel harassant fait de tâches diverses dont ils s'auto-congratulent. Parfois vient ce qu'ils appellent des aléas. Ces petites choses qui n'ont été créées que dans le but de leur faire croire qu'ils n'ont pas de quotidien, pour leur faire penser qu'ils changent et s'adaptent. Ils ne s'adaptent pas non plus. Ils suivent un chemin tracé par les Pères de leur civilisation. Les quelques errants ou vagabonds de la vie sont rapidement éliminés. Ces êtres n'aiment pas la différence. Ils aiment le préconçu. D'ailleurs, leur vie entière est faite d'objets préconçus, plus rapides à monter, plus rapides à démonter. Aucune trace n'ait laissée, obéissant toujours à sa règle de ne pas créer mais se contenter du passé pour penser qu'il a une histoire, un vécu, une mémoire.
C'est ce monde qui, pour répondre à un besoin d'irréel, d'insoupçonné voire d'inimaginable, à donner naissance à d'autres êtres. Des êtres qui, dès leur naissance, ont été rejetés. Les hommes ont besoin de rejeter la faute sur autrui. N'ayant plus de marginaux à se mettre sous la dent, la naissance de ces nouveaux êtres a été un réel soulagement pour eux. Enfin leur besoin primaire allait être assouvir: ils étaient devenus chasseurs. Le jour avocat ou autre personne rangée sans histoire, fade, la nuit traqueur, tueur, donnant ainsi tout un sens à sa vie. Il y aurait désormais du piquant, de l'inespéré dans une existence à la base si terne.
Le besoin de sang, ce liquide vital, si précieux, rare et convoité, des hommes s'est rapidement fait sentir. En laissant échapper ce fluide vermeil, l'homme ressent un sentiment de supériorité qui, pourtant, est très éphémère car, bien vite, il est nécessaire de repartir en chasse. Traquer sa proie, la ramener, la vider et recommencer. Ainsi, même dans de nouvelles activités, la tendance de l'Homme de s'enfermer dans une ronde malsaine et sans faille était primordiale. Malgré tout, il conserva sa volonté de domination, qu'il étendit à tous les êtres qu'il jugeait inférieurs. On les écrase, on les asservit, on les élève même pour les écraser à nouveau. Mais lorsque les créatures se révoltent, lorsqu'elles deviennent plus fortes, lorsque apparaissent des êtres que l'Homme n'a pas pensé, la nature du chasseur solitaire revient dominer son esprit étriqué.
C'est ainsi que, peu à peu, une espèce s'est développée dans l'ombre, fauchant l'Homme là où il ne s'y attendait pas, le regardant souffrir et gémir et l'achevant, le délivrant ainsi d'une intolérable souffrance: celle qu'est la vie des Hommes. Cette espèce qui, bien que dominante, n'a pas souhaité révéler sa nature, terrifiée à l'idée de devenir l'image immortelle des Hommes. Une espèce dont l'intelligence fut d'être simplement différente de l'être humain. Tellement étrange et insoupçonnée que l'Homme ne put lui trouver de nom, rivalisant de qualificatif tous plus péjoratifs les uns que les autres. L'homme jaloux face à l'incompréhensible. Très vite, on se refusa de parler de l'Espèce. La taire est, pensaient-ils, la meilleure façon de la vaincre. Mais l'Espèce n'était en aucun cas comme l'Homme. La taire eut l'effet inverse: cela la fortifiée, la rendue encore plus forte, plus dominante qu'elle ne l'avait jamais été. L'homme terrorisé devant l'incompréhensible: quelques chose était donc plus puissant que lui. L'homme abandonné dans l'effroi. Cette espèce, un jour, on la qualifia pourtant. Ce fut un Homme qui le fit. Peu avant d'être victime de ses expériences nominatives. Il avait choisit quelque chose de dur, d'avilissant, comme pour asseoir la domination des Hommes sur l'Espèce: ne pouvant le faire physiquement, psychologiquement ou intellectuellement, l'être humain le fit par la nomination.
On leur donna le nom de vampires.
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